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jeudi 10 juillet 2014

Île était une fois... du fun et des méduses



Il existe dans les îles de la Polynésie Française une espèce particulière d’huitre perlière : la pinctada margaritifera (ou huitre à lèvres noires). Sa nacre est d’une qualité exceptionnelle et elle produit des perles parmi les plus belles du monde.

Le Pacifique sud et les atolls polynésiens s’ouvrirent aux premiers européens avec Magellan en 1521. Les journaux de bords et les récits marins de l’époque relatent la beauté magique des paysages, un accueil chaleureux des tahitiens mais aussi une certaine fièvre pour les richesses qu’on y découvrait.

La nacre et la perle furent rapidement au centre des préoccupations européennes. Ainsi les Tuamotu devinrent « les îles aux perles » dont le lagon de Ahe qui demeure un des hauts lieux de la perliculture en Polynésie. Un lagon ni trop grand ni trop profond avec de nombreux rochers où s’accrocher, de l’eau salée non acide, une température d’eau confortable, beaucoup d’oxygène, de quoi se nourrir, voilà la recette parfaite pour la fabrication de la perle.

Jusqu’en 1950 env, les lagons furent ratissés par les commerçants et les trafiquants à la recherche de la nacre, l’or noir des atolls. Mais avec l’invention des matériaux issus du pétrole, la nacre tomba en désuétude. La grande époque de la nacre s’éteignit en même temps que naissait l’ère de la perle ainsi que le tourisme. Depuis 2003, la perle de Tahiti traverse une crise, fortement liée au contexte international, tout comme le tourisme qui ne cesse de décroitre d’année en année.


Je ferme la parenthèse historique pour en revenir à la vie à la ferme.


Nous avons dû apprendre à gérer l’eau et l’électricité. La ferme et les bungalows étaient équipés de grosses citernes qui nous permettaient d’avoir de l’eau douce pour boire et se laver. La vaisselle se faisait à l’eau de mer, rinçage obligatoire à l’eau douce pour éviter la rouille.
chasse d'eau manuelle (ça fait les bras!)
  Quant à l’électricité, elle était générée uniquement par des panneaux solaires, donc si pas de soleil pas d’électricité. Le frigo pouvait tomber en rade 2 jours d affilés et le soir tous les branchements superflus étaient bannis. 
Si je vous dit : épreuves par équipes, rationnement des denrées alimentaires, environnement hostile, confort sommaire, chicanes, réconciliations... vous pensez à quoi?
Ha ha ha et dans le rôle de Denis Brogniard : Pa'U bien sûr!

L’air salin était impitoyable pour les appareils électronique et divisait leur durée de vie en deux, le sel bouffant tout! des tongs aux vêtements. L’humidité constante s’occupait de pourrir les vêtements restés trop longtemps en boule et était aussi dangereuse pour la guérison des plaies. Et dieu sait qu’on s’en ait fait des bobos, les plaies ne se refermant pas, il fallait constamment se désinfecter au citron et dans les cas de gros bobos, c’est cure d’antibiotiques pour éviter l’infection.
Scratch sur le reef!

La chaleur, le soleil et les moustiques étaient nos ennemis quotidiens mais les véritables dangers venaient surtout de la mer.

Lors des parties de pêche, les courants pouvaient nous déporter de plusieurs dizaines de mètres en quelques secondes.


Et sous l’eau un vivier de bestioles tels que murènes, oursins, poissons pierres et méduses!


Quand nous n'allions pas à la pêche, après le boulot, nous avions pour habitude de relaxer, lecture et cueillette de cocos au programme.




Mais notre passe temps favori était sans conteste la nage et la plongée autour de la ferme.

 
Le paysage sous marins nous révélait alors ses plus belles facettes mais m’a aussi réserver une surprise de taille!

Alors que je nageais tranquillement j’ai été soudainement secoué. Une violente électrocution s’est emparé de tout mon corps me paralysant complètement. Au début, j’ai cru avoir touché un fil électrique. Je me suis mise à hurler tout en réalisant que j'avais des filaments bleus collés sur tout le corps. Les autres me regardaient depuis le ponton, stupéfaits, pensant que j’avais dû marcher sur un oursin. Je réalise qu’ils ne peuvent pas venir me secourir dans l’immédiat (la ferme étant poser sur un énorme caillou de coraux, il n’est pas possible de sauter dans l’eau de ce côté-là car pas assez de profondeur) et que je suis en train de me noyer.
La patate de coraux sur laquelle se tenait la ferme




Mon instinct de survie l’emporte et je nage comme une folle jusque de l’autre côté et remonte l’échelle en criant de douleur. Arrivée sur le ponton je m’effondre et là je reçois une vive douleur en bas du dos. Comme si j’avais la colonne brisée. Personne ne comprend pourquoi j’hurle de douleur par rapport à mon dos puisque qu’il n’y a pas de piqûre à cet endroit. Je me dis que j’ai du me déplacer une vertèbre dû à la soudaine contraction de mon corps. Mais en réalité il s’agissait du poison qui commençait son effet de paralysie. Je me vois en train de clamser, je n’arrive plus à respirer.

La physalie tue en effet ses proies par électrocution y injecte son poison par ses filaments collants qui se chargent d’attaquer les organes vitaux dont la moelle épinière. La douleur intense a duré une vingtaine de minutes puis j’ai ressenti de vives brûlures sur et dans tout le corps. Je criais qu'il fallait m’emmener à l’hôpital mais à Ahe il y a juste une infirmière au village et j'étais dans un tel état que ça aurait été trop compliqué de m'installer dans le bateau (sans parler du trajet).

Cette sensation de brûlure a duré 7h, le temps que le poison se dilue.
J'ai pas vu ma vie défiler mais j'ai réellement cru que ma dernière heure était arrivée! si j'avais été piquée plus loin j'y serais resté, comme quoi la vie tient parfois qu'à un filament...


Vers 23h, les douleurs s’amenuisent. Je passe une sale nuit car par endroit la méduse s’est acharnée et m’a injecté de puissantes doses de poison, me laissant de vilaines marques noires qui restent un peu douloureuses mais je suis sur pied et c’est le principal.


Merci aux collègues qui ont fait ce qu’ils ont pu pour me soigner et qui ont pris soin de moi avec bienveillance.
Bon, il valait mieux que je me remette et vite car c’était l’anniversaire d’Olive et j’allais pas rester couché comme une infirme alors que la fête allait battre son plein à la ferme!

 

 






La fine équipe!


Le lendemain, c’est fiu dans le bungalow mais on ne tient pas longtemps tellement la chaleur y est étouffante, alors on file ronquer à la ferme, la bas au moins il y a de l'air!


 
sublime ptilope des Tuamotu

Nous ne sommes pas beaucoup sortis de notre îlot mais nous avons quand même fait une expédition au sud de l’île pour snorkeler et explorer quelques coins idylliques.
Poisson de la famille de la rascasse, attention ça pique!



Nous avons fait également quelques virées au village. Il est minuscule avec sa rue piétonne centrale et ses lampadaires solaires, son échoppe à gourmandises, et son église et son magasin principal. 

Les habitants se déplacent à tricycle avec une petite benne à l’arrière, très pratique pour transporter les commissions ou les enfants.

Ce jour là, une équipe est partie à la pêche, l’autre a relaxé toute la journée sur la magnifique plage de sable blanc. 




 








On est reparti dans la nuit, faisant confiance au capitaine qui cherche ses repères par rapport aux étoiles.
Pas question d'aller se coucher en rentrant!

Olive vainqueur par ko! :)


Bain de minuit

Le jeudi était le jour des réapprovisionnements. On se rendait alors au village pour récupérer les commandes qui arrivaient par cargo.


Pour notre ferme, c’était souvent les mêmes aliments de base : riz, pâte, sauce tomate, oignons, ail, patates (et quelques autres légumes suivant arrivage) lentilles, café, champignons, beurre, huile, sucre, œufs et confitures. La plupart de ces aliments étant classés PPN (produits de première nécessité) avec des prix abordables.

Il a fallu très vite oublier le fromage, la charcuterie, la viande, la crème, le chocolat… bref tous les petits plaisirs gustatifs de la vie! 


Certes, il y avait bien un petit magasin près de la ferme qui proposait un petit choix d’aliments non périssables mais on y laissait notre porte flouse à chaque fois! On s’y rend en bateau, on enlève ses tongs à l’entrée et on rentre par groupe de 3-4 max. Attention les prix, ça pique! 

Ex : 1 pot de faux nutella (6€), paquet de gâteaux(4€), paquet de chips(6€), 1,5l de coca(6€), 1 paquet miels pops(7€) et je vous garde le meilleur pour la fin : 1l de rouge en brique(12€) et 6 bières(18€)



Au village nous avons rencontré un personnage. Il s’agit de King Kong le tatoueur. Suite à cette rencontre nous avons décidé de nous faire tatouer. 
Le tatoueur avait confectionné un dessin unique pour Olive quant à moi je lui ai suggéré des idées et il a laissé libre court à son imagination :) 
Celui-ci a passé 4 jours non stop à la ferme à tatouer quasiment toute l'équipe!

 


Et voilà le résultat!
6h de job! Tiki et hameçon en peway
 sur le devant une tortue (un peu lente comme moi et c'est le seul animal qui mange les méduses hihihi) 3h de job!
et à l'arrière : liane polynésienne
 sur les côtés : 2 tikis


Malgré un confort sommaire, le manque de technologies, d’informations (on aurait pu être en pleine 3eme guerre mondiale, qu’on en n'aurait rien su) et des nouvelles de nos proches (la connexion internet via une clé, ne nous fournissait pas plus que du 5k, pour ceux qui se rappellent les modems 56k c’est du haut débit à côté), nous avons passé un séjour inoubliable, en dehors du temps et de la civilisation. 
Nous revoilà à bord du bateau pour le départ
Tchao Laurent!
Good bye Ahe


Ce décor exceptionnel nous manque déjà, magnifié par le spectacle quotidien que nous offraient les requins.


Et bien sûr, toute l’équipe de la ferme! 
Bien entendu nous sommes repartis avec quelques belles perles!


 Pour terminer cet article en beauté, voici la vidéo de notre aventure à Ahe (made by Olive). Enjoy!!!! (cliquez sur le lien)Kamoka, 2 mois sur une autre planète!

4 commentaires:

  1. C'est vraiment un super blog !!! Votre expérience est enrichissante et superbement bien expliquée ! Si nous menons à bien notre projet, ce serait un grand plaisir de vous rencontrer et de trinquer sur une plage !!! Bonne continuation, Stéphanie.

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  2. Bonjour,
    et félicitations pour votre blog ! Il est bien écrit et accessible, agréable à lire. J'ai tout lu en plusieurs jours. Pour une ancienne journaliste, je trouve ça pas mal fait. Vos photos sont superbes. Explicites. Peut-être m'avez-vous donné envie de créer mon propre blog, je vais voir. Vos aventures sont incroyables ! Ca mérite au moins un article ! Vous devriez aller voir les journaux là-bas, la presse et les magazines locaux, pour vous faire connaître, peut-être d'abord prendre contact par mail en invitant les journalistes à visiter votre site. C'est un sacré article qu'ils pourraient faire sur vous. Enfin... si j'étais à leur place ! Vous devez avoir tous les deux beaucoup de force pour vivre tout cela, d'autant que vous n'en êtes pas à vos premiers trips. Et surtout pour résister à cette incroyable méduse et pour plonger ainsi. Faites attention quand même ! D'ici, tout ça fait rêver (même si camper me fait pas trop envie !) mais ça fait aussi flipper tout ce qu'il y a dans l'eau !...
    Par rapport à votre recherche d'emploi, je me suis connectée plusieurs fois via ma radio logitech sur Radio Polynésie, la Une je crois, pour me faire une idée, et au matin chez vous un peu après 6 h 30, vous avez des petites annonces en direct, des offres d'emploi. Ah, ça doit pas être facile, mais les annonces, pas beaucoup, genre 2 ou 3, ont l'air sûres et intéressantes. Vous pouvez toujours essayer !
    Bon courage dans vos recherches & j'ai hâte d'avoir la suite de vos aventures.
    @ bientôt,
    Sabrina,
    Expat' aux Pays-Bas (à la recherche d'autres horizons!)

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  3. Un petit bonjour à mon Ami Laurent de Kamoka ,Fredy (ancien chef de ferme de Maruata en 2008).
    Avec mon meilleur souvenir,
    Cordialement.

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  4. Laurent ,j'aurai aimé avoir ton mail ,pour avoir de tes nouvelles.
    Cordialement.

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